Ñuul kukk, un slogan pour dire Non à la dépigmentation



Il suffit juste de visiter les vestiges préhistoriques pour conclure que l’image fut l’un des premiers moyens d’extériorisation de la  pensée. L’Homme a utilisé l’image, autrement le  dessin durant des siècles avant de passer à la parole. Son antiquité révèle toute sa valeur.
La capacité de transmission d’information de l’image dépasse largement celles du texte et de la parole. Ces derniers ont rapport avec la langue. Qui dit langue, dit communication, et pour que deux individus communiquent, il nécessite certainement l’emploi du même langage. Pour transmettre une information il faut qu’on utilise le même code que celui de notre interlocuteur. L’image est un moyen de communication universel. En effet, elle traverse frontières et barrières linguistiques.

En un clin d’œil, l’image transmet le maximum d’information

La publicité qui passe à la télévision ne dure que quelques secondes ou quelques minutes, personne ne s’arrête jamais devant un panneau publicitaire dans la rue pour observer les images afin de procéder à une analyse. Et  pourtant, ces publicités qui passent chaque jour à la tv ou ces panneaux dans la rue nous transmettent des impressions. Ce qui est grave, c’est que l’individu a tendance à croire à tout ce qui lui est présenté sous forme d’image et même s’il reconnait que ce n’est pas la réalité, il  ira jusqu’à l’idéaliser. Cela démontre la puissance de transmission d’information de l’image. La consommation dans les grandes villes dépend largement de la publicité. De nos jours, l’image a une grande influence sur nous. Nous sommes tous manipulés par les images.

Irréalité sur les images

 Les technologies sont venues empirer les choses. Toutes les images publicitaires sont retouchées, montées de gauche à droite pour avoir la meilleure esthétique possible. Images sur panneaux publicitaires comme images de télévision.
Prenons l’exemple de la femme qui figure sur l’affiche de "khess petch", (si blanche)  en un clin d’œil, on remarque la première chose la plus irréaliste : c'est la couleur de la peau de cette femme sur cette affiche. Je ne pense pas qu’une femme a une fois acheté des produits de dépigmentation et obtienne la même couleur de peau.  Mais bizarrement, elles continuent à les utiliser. En conséquence, en devenant ce que j’ai toujours appelé "deux ton ", pour faire allusion aux "thioub" (boubous africains teintés dont il existe un modèle composé seulement de deux couleurs qu’on appelle : deux tons). C’est très rare de voir une femme qui se dépigmente et qui n’est pas une « deux tons ».

Être la seule à avoir la peau noire au milieu de ses copines

Interpellée sur la question, Daba, une jeune fille me confie : "Des fois, j’y pense tellement, jusqu’à avoir envie de le faire. J’ai trois copines qui se dépigmentent. Et la plupart du temps, quand on est ensemble, elles  commencent à me taquiner, en me disant est-ce que tu te regardes dans le miroir, tu es si noire, on dirait que tu ne laves pas. On t’assure même si tu utilisais une bassine de produits pour dépigmentation, tu n’auras jamais la peau claire. "
C’est évident, être la seule à avoir la peau noire au milieu de ses copines peut des fois gêner certaines filles, et c’est ce qui pousse ces dernières à s’y lancer.

"Je ne vais jamais te vendre ces crèmes éclaircissantes.  […] je ne veux pas pécher "

Elle explique aussi qu’il y a une dame qui habite à côté de chez elle, qui se dépigmentait, mais actuellement, elle a abandonné. Néanmoins elle continue de vendre les produits. Un jour, elle a voulu taquiner cette dernière en lui disant « aujourd’hui vous me vendrez un produit pour que je commence à me dépigmenter", aussitôt la dame répliqua  ainsi : "je ne vais jamais te vendre ces crèmes éclaircissantes. La cause en est que, je ne veux pas pécher. Parce que tu perdras ta peau qui est originale et si belle et je serai la responsable. "
Et la dame ajouta : tu n’as pas vu mon visage comment il est ? Si je savais c’est ceci qui sera le résultat, je n’allais jamais me ces produits.

"Sa peau ne pouvait pas retenir les fils, elle se déchirait à chaque fois. C’était le résultat de la dépigmentation "

Après m’avoir beaucoup raconté sur cette femme, Daba me confia pourquoi elle ne fera pas du "xessal ". "Ma grande sœur, s’est dépigmentait durant des années, et lorsqu’elle s’est mariée, elle est tombée enceinte, des difficultés sont survenues lors de l’accouchement. Et elle a subi une césarienne. Mais lorsqu’on suturait la plaie, sa peau ne pouvait pas retenir les fils, elle se déchirait à chaque fois. C’était le résultat de la dépigmentation. C’est par chance que ma sœur s’est sortie de cette opération. Et depuis lors, elle a abandonné. Donc, moi je connais les conséquences de la dépigmentation, c’est pourquoi je ne tenterai jamais de me blanchir la peau."
Des mots qui reviennent à chaque fois qu’une "deux tons" est interrogée sur le pourquoi elle se blanchit la peau : ma grande sœur, mes amies qui m’ont donné envie de le faire ou encore je veux avoir un époux. Mais aussi j’y ajoute la publicité, ce que ces femmes voient  à la tv et sur les affiches.
La télévision a tellement de pouvoir sur l’individu. A mon avis, cet objet que l’on retrouve dans tous les salons en ville est une  directrice psychologique chez certains. 
Par conséquent, le meilleur moyen d’encourager les femmes à maintenir la peau noire, c’est d’avoir des journalistes et animatrices de teints noirs sur le petit écran. Mais malheureusement, dans notre pays, les émissions qui ont la plus grande audience sont animées par des femmes qui se blanchissent la peau. Et pire encore, avec des émissions où on ne raconte et ne montre que des balivernes. Ces plateaux ne sont qu’une illustration de la futilité qui se passe sur nos chaînes de télévision du matin au soir.
La télévision a son public mais aussi les réseaux sociaux et internet en général ont leurs siens. Ce qui est important à noter, c’est que, cette grande toile mondiale que des millions de personnes parcourent chaque jour n’appartient à personne. Soit on est consommateur, soit on est producteur, c’est la seule règle qui y règne.
Au Sénégal, nous en avons parmi ces acteurs.

AgenDakar, Numérika et Optima, sentinelles de la noirceur


Aujourd’hui après tant d’années  que ces mauvais produits cancérigènes sont, j’ose le dire ainsi, largués par nos gouvernants (manque de contrôle dans les produits importés) partout dans nos marchés, la génération www vient de donner un coup fatal aux promoteurs de ces crèmes éclaircissantes, tout en marquant un pas important sur le retour à l’identité culturelle, aux valeurs et aux références.
Lancé sur le monde virtuel par AgenDakar.com avec des infographistes, autrement sur internet, "Ñuul kukk", une expression qui insiste sur le degré de noirceur, donc, contraire de "Khess petch" est transférée dans la vie réelle par les agences Numérika et Optima. Ces dernières ont affiché sur leurs panneaux publicitaires une très belle femme noire partout dans les  lieux de la capitale sénégalaise qui enregistrent le plus grand nombre de passants. De cette manière, AgenDakar.com, Numérika et Optima deviennent des sentinelles de la beauté africaine.
 Au vu de ce qui se passe actuellement, sur internet, avec la mise en ligne d’un site spécialement dédié à la femme noire avec une page facebook et les images que nos sœurs et mamans voient désormais sur des panneaux publicitaires, nous pouvons espérer un éventuel changement de ces crèmes et une meilleure considération de la noirceur d'ébène. Ainsi compter moins de  « deux tons» dans notre pays et pourquoi pas dans d’autres pays comme le Mali et la Côte-d’Ivoire où ce phénomène continue à régner en tant que indicatrice de beauté.

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